La licorne, cet animal imaginaire, est choisie par Roger Vailland pour représenter la femme nouvelle.
Au fil de ses romans, sont qualifiées de licornes des femmes souvent jeunes mais pas forcément, parfois jolies mais pas toujours, libérées mais pas au sens commun, libres en soi quoique mariées parfois, inclassables et indéchiffrables. La licorne est impossible à posséder, et très difficile à cerner ! A court de moyens, il invente dans son dernier roman une autre métaphore, celle de « la truite ».
C’est peut être aussi une plongée hypersensible dans la dialectique de la féminité, de la part d’un homme lucide à l’approche de sa fin. Roger cerne encore un autre caractère de la licorne-truite, le désintéressement, apanage de la jeune fille nouvelle comme il a pu être celui du libertin au regard froid.
« De vraies sauvages dans le sens où on le dit des Masaï, des Cafres, des Papous, des indigènes d’Australie. ». Elles ne croient ni en Dieu ni à l’enfer.
Ce type de femme a un étrange rapport à l’homme. Pour parachever l’énigme, la Truite ne sait elle-même répondre à la question :« Était-elle vierge ? Oui et non. Elle ne savait pas si elle avait jamais été vierge, au sens qu’on lui avait expliqué. Mais jamais pénétrée par l’homme. Et ne désirant pas l’être. ». On pardonnera au mâle éperdu cette réplique : « … vous n’êtes pas gouines, mais plus gouines que des gouines, des filles terribles. ».