Message de Jacques Henric à Alain (Georges) Leduc, 5 février 2015
Cher Monsieur,
Je découvre donc qu’il existe un site Roger Vailland et je m’en réjouis. Il est vrai que pour jeune militant communiste que j’étais, Roger Vailland a représenté pour moi un contrepoison à la conception jdanovienne de la littérature défendue par le PCF et notamment par le Aragon de l’époque (tous deux ne s’aimaient guère, Vailland gardant en mémoire la polémique des surréalistes avec le Grand Jeu,
ce groupe auquel il avait appartenu aux côtés de Lecomte et Daumal). Je n’ai rencontré qu’une fois Vailland à Paris, présenté à lui par Adamov, il venait alors suivre des soins pour le cancer qui l’emporta peu de temps après. Le libertinage contre le puritanisme stalinien, c’était pour moi. Cela dit, je n’ai pas relu ses livres depuis cette époque, je ne les ai plus sous la main. Je ne vois pas bien ce que je pourrais vous dire de plus. Écrivant dans les Lettres Françaises, et tenant la rubrique littéraire de France-Nouvelle jusqu’en 1968 (j’ai raconté tout ça dans mon livre Politique publié au Seuil), je n’ai bizarrement pas le souvenir d’avoir écrit sur ses livres que j’aimais pourtant beaucoup. Il faudrait que je remette le nez dans des archives. Vailland, depuis les événements de Hongrie où il avait pris ses distances avec les positions du PC, n’était plus persona grata dans sa presse. Le dernier livre de Vailland que j’ai lu, c’est son Journal paru chez Gallimard.
Voilà ce que je peux vous dire aujourd’hui sur Vailland. A-t-il de jeunes lecteurs ? Autour de moi, à Art press par exemple, j’en entends peu parler. C’est dommage. Dans les tristes temps qui courent, ce serait sans doute une bonne chose de le sortir du purgatoire, si purgatoire il y a. Je suis sûr que c’est ce à quoi vous vous attachez, avec ce site qui lui est consacré. Je vais d’ailleurs le visiter au plus vite.
Pourquoi pas un Pléiade ? Son œuvre vaut bien celle d’un Vian ou d’un d’Ormesson, non ?
Bien cordialement à vous,
Jacques Henric.